Les représentants du Collectif "Stop-Tafta du pays de Brest lors de la conférence de presse vendredi 3 octobre. |
Les
citoyens français ne le savent peut-être pas, mais depuis le 14
juin 2013, des négociations entre les États-Unis et la Commission
européenne se trament pour créer un vaste marché transatlantique
jamais conçu jusqu’à présent : le Grand Marché
Transatlantique (GMT), qui en est le nom générique. Ce qui n'aurait
dû rester que secret a été mis au grand jour par des fuites en
février dernier. Ce traité est connu sous divers noms anglais et
français : Accord de Partenariat Transatlantique (APT),
Transatlantic Trade and Investment Partnership (TTIP),
Partenariat Transatlantique sur le Commerce et l'Investissement
(PTCI), et enfin par son nom le plus usité, Trans Atlantic Free
Trade Agreement (TAFTA). Heureusement, des citoyens se mobilisent
des deux côtés de l'Atlantique contre ce traité. En France, des
partis politiques : le Front de Gauche rassemblant le Parti
communiste français, le Parti de Gauche, et Ensemble (Les
Alternatifs, Convergence et Alternance, la Fase (Fédération pour
une Alternative Sociale et Écologique), la Gauche Anticapitaliste
(GA), mais aussi des syndicats et des associations de citoyens
s'emparent de cette question volontairement passée sous silence par
les médias, la Commission européenne et le gouvernement français.
Ils ont crée le collectif « Stop-Tafta ». Celui du pays
de Brest tenait une conférence de presse vendredi 3 octobre. Car le
danger est bien réel avec cet accord de libre-échange pour nos
agriculteurs, notre environnement, notre santé, nos entreprises
privées comme publiques, notre administration et même notre
« exception culturelle française ».
C'est
la Commission européenne qui s'est vue confier la mission, en toute
discrétion par le Conseil de l'Europe (réunissant les Chefs d'États
et de gouvernement des 28 États membres de l'UE), de négocier le
traité Tafta avec le gouvernement des États-Unis d'Amérique le 14
juin 2013. En fait, le Grand Marché Transatlantique (GMT), c'est le
serpent de mer qui revient continuellement siffler à nos oreilles
depuis le 22 novembre 1990, date de la signature de la Déclaration
Transatlantique par la CEE (Communauté Économique Européenne) à
l'époque et ses pays membres avec les USA, sur fond de fin de guerre
froide. Cette Déclaration ambitionnait de « promouvoir les
principes de l'économie de marché, de rejeter le protectionnisme et
d'étendre, de renforcer et d'ouvrir davantage le système commercial
multilatéral ». Tout était déjà dit. En 2007, un cap
décisif supplémentaire était franchi avec la signature de
l'accord-cadre créant le Conseil économique transatlantique (CET)
par le président de la Commission européenne de l'époque, José
Manuel Barroso, la présidente du Conseil européen d'alors, Angela
Merkel, et le président des États-Unis, Georges Walker Bush, dans
le seul but de faire sauter les verrous au libre-échange entre les
deux rives de l'Atlantique par une harmonisation des législations,
des réglementations et des normes. C'est dans le cadre du CET qu'a
débuté les négociations pour le traité TAFTA. 93 % des
multinationales européennes sont impliquées par cet accord.
Celui-ci vise la réduction, voire la suppression des droits de
douanes mais aussi des normes des douanes susceptibles d'être
contraignantes pour leur commerce : les E-U pourraient ainsi
vendre en Europe des poulets au chlore, des bœufs au hormones, du
maïs OGM et d'autres produits à mille lieues de nos normes. Les
firmes multinationales pourraient forer le sol français à la
recherche de gaz de schiste et l'exploiter contre la volonté des
Français. Mais notre sol n'est pas à vendre.
Et
surtout, dispositif qui fait polémique dans ce traité, la
possibilité pour une firme multinationale de saisir des tribunaux
d'arbitrage privés, comprenant 3 juges désignés par les parties en
présence, contre un État si elle s'estime lésée par des normes
environnementales, sociales, sanitaires ou culturelles dans ses
actions. Par exemple, la société Lone Pine Resources a
réclamé 250 millions de dollars de dédommagements au gouvernement
canadien parce que le Québec avait déposé un moratoire sur la
fracturation hydraulique et qu'elle estimait que sa liberté à
entreprendre, garantie par le traité de l'ALENA (entre les E.-U., le
Canada et le Mexique) était bafouée par cette mesure. Un membre du
Collectif « Stop-Tafta » du pays de Brest alerte que
« sur 30 cas de procédures dans ces tribunaux privés
arbitraux, ce sont toujours les États-Unis qui ont gagné ».
Tout ça pour un objectif de croissance très faible, autour de 0,5 %
pour les plus optimistes.
Un
représentant du syndicat Solidaires Douanes prévient : « C'est
un nivellement par le bas, les barrières tarifaires disparaîtraient
, notamment sur les produits agricoles qui sont encore les derniers
produits protégés en Europe, les normes étant complètement
différentes de celles des États-Unis ». Il renchérit
même : « Par ce traité, les patrons pourraient
délocaliser et changer de normes sociales, sanitaires et
environnementales impunément ». Quentin Marchand, du Parti
de Gauche de Brest, ajoute : « Cet été, une
consultation sur les tribunaux arbitraux a été organisée par la
Commission européenne comme la législation l'y autorise, et 150 000
citoyens européens ont répondu non à cette mesure, mais
malheureusement ceux-ci n'ont été considérés par ladite
Commission que comme un seul répondant ». « On
nie la parole du citoyen», déplore-t-il. « Nous
interpellons aussi les élus locaux, car ils sont directement menacés
par ce traité, tout comme les citoyens, et nous sommes en
particulier en étroite collaboration avec nos élus européens du
Grand Ouest, Myriam Martin pour le Front de Gauche et Yannick Jadot
pour Europe Écologie Les Verts (EELV), déjà hostiles à ce
projet », prévient un membre du collectif « Stop-Tafta »
du pays de Brest.
En
conséquence, ce collectif appelle tous les citoyens à des
« manif'actions » partout en France le samedi 11
octobre prochain contre ce projet dangereux pour la démocratie,
l'environnement, la santé et notre modèle social. Celle de Brest
aura lieu à 14 h 30 place de la Liberté. Par ailleurs, le mouvement
citoyen « Nouvelle Donne » organisera le samedi 18
octobre une réunion d'information sur ce traité avec Bruno Gaccio
(le créateur des Guignols de l'info) au patronage laïque
Sanquer à 20 h 00.
Pour
plus d'informations : http://www.collectifstoptafta.org
Marc Gidrol
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