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La haine au cœur du Conseil municipal de Brest

Le conseil municipal de Brest qui s’est tenu jeudi 10 mars devait porter sur le budget primitif de la villemais il a été perturbé par des jeunes militants du collectif « Casss’papiers » qui ont fait irruption dans la salle du conseil municipal et qui l’ont bloqué, estimant ne pas avoir eu de réponses satisfaisantes de la part de la municipalité par rapport à une vingtaine de migrants albanais demandeurs d’asile à Brest. Le Conseil était donc bloqué… de 16 h 30 à  plus de 20 h. Avant de pouvoir reprendre éphémèrement à partir de 20 h 30, le temps de voter quatre délibérations dont celle du budget primitif de la ville, dans le vacarme, jusqu'à ce que le maire, très hésitant, se décide enfin à faire évacuer la salle !

Le conseil municipal avait pourtant bien commencé.  Les élus expriment des interrogations, des inquiétudes avant l’ordre du jour, comme d’habitude. En ouverture de séance, la Chef de file de l’opposition brestoise RPB (Rassemblement Pour Brest), Mme Bernadette Malgorn, intervient sur deux sujets : la gouvernance de Brest Événements Nautiques et la sécurité. Elle s’étonne notamment à propos de l’association des fêtes maritimes de Brest d’ « un nouvel épisode de crise de gouvernance ». Alors que le budget de Brest 2012 avait grimpé à 17 millions d’€. À tel point que la Chambre régionale des comptes de Bretagne « avait formulé en 2014 des recommandations pleines de bon sens dont (nous) avons souhaité qu’elles soient appliquées par la gouvernance de l’événement qui n’est autre, sous forme associative, qu’un de ces multiples satellites de nos collectivités présidée par vous-mêmes, monsieur le Maire ».

Mme Malgorn rappelle le montant exorbitant de la rémunération des dirigeants des fêtes maritimes précédentes : « 123 000 € brut annuel pour le premier directeur, soit environ 8 000 nets mensuels, et de l’ordre de 9 700 € brut mensuel pour un temps partiel de 80 % pour le second directeur désigné dans l’urgence ». Elle note que « (vous) nous avez présenté, pour l’édition 2016, un budget ramené à 12 millions d’€ ». Elle rappelle alors que dans ces conditions, son groupe a « soutenu le projet et voté les subventions, ici et à la Métropole ». Elle rappelle les péripéties liées à la gouvernance des fêtes maritimes internationales de Brest. « Cela se produit à chaque fois à quelques mois de l’évènement ».

« (…) début 2015, à l’annonce de la nomination de M. Arbelot, professionnel reconnu dans le milieu du nautisme. Un an après il jette l’éponge selon vous ou est débarqué, selon lui. On ne sait pas très bien ». « La fonction éditoriale serait-elle frappée d’une malédiction ? », se demande l’élue de la droite et du centre brestois. Elle note « un certain flottement » avec « le Conseil d’administration de Brest événement nautique initialement prévu en février dernier et décalé au 30 mars prochain ». « Tout ceci jette un trouble de nature à ternir la réussite de l’événement », juge Mme Bernadette Malgorn. Elle demande enfin « quelles sont les difficultés actuelles au sein de Brest événements nautiques et donc de Brest 2016 ? »

M. le Maire de Brest, François Cuillandre, rejette de tels propos. « Sur les fêtes maritimes, la Chambre régionale des comptes nous dit qu’il ne faut pas mélanger les genres ». Il assure être « le principal dirigeant de cette association (ndlr, Brest événements nautiques) mais je n’en suis pas rémunéré ». Avant de poursuivre : « Par contre je suis juridiquement responsable en cas d’accident pendant les fêtes maritimes, si quelqu’un tombe à l’eau je sais qui on viendra chercher ».

Mme Malgorn s’interroge aussi au sujet de la sécurité. « Le dernier Sillage nous le dit : “La Sécurité est l’affaire de tous“. Bien ! ». « C’est assez nouveau dans la rhétorique municipale puisque naguère au-delà du terme “tranquillité publique“ ce n’était plus votre affaire », fait remarquer l’élue. Mais elle pointe « une approche incomplète voire édulcorée » des articles parus dans le dernier numéro de Sillage. « Pas un mot sur un trafic de stupéfiants qui explose ». « Pas un mot sur la montée du radicalisme dont notre ville est atteinte », déplore encore l’élue très bien informée des problèmes de sécurité dans la cité du Ponant.

« C’est aussi l’affaire de tous, chacun faisant son métier : on ne demande pas à la collectivité de se substituer aux services spécialisés, mais d’assumer sa mission préventive, éducative, et de faire rayonner les valeurs républicaines parmi lesquelles il n’est pas indifférent en cette semaine du 8 mars d’évoquer l’égalité hommes / femmes. Et à tout le moins on pourrait souhaiter que la collectivité n’apporte pas son aide, via un autre de ses satellites, à ces prêcheurs de haine et de radicalisation ». Suivez mon regard. Elle vise bien sûr l’imam youtuber de la mosquée salafiste Al-Sunna de Pontanézen.

Là encore M. François Cuillandre est visiblement très agacé par ces remarques. « Dans cette ville je circule tous les jours, de quel droit vous dites que je ne suis pas conscient des problèmes d’insécurité ». Puis il lâche une petite phrase comme il en a coutume et dont lui seul a le secret : « Tout ceci glisse sur moi comme l’eau sur les plumes d’un canard ».

Un budget municipal en équilibre… mais précaire

Avant cette interruption impromptu du conseil municipal, quelques interventions des élus sur le budget ont pu être exprimées. Je les relate ici. Mme Bernadette Abiven, Première vice-adjointe au maire, en charge des finances, comme elle l’avait déjà fait au conseil de métropole du vendredi 4 mars, elle a présenté les grandes lignes des investissements de la commune pour 2016 : les Capucins, le fameux téléphérique, les non moins célèbres fêtes maritimes internationales qui ont lieu tous les quatre ans, l’ouverture de l’établissement pour personnes âgées, l’EHPAD de Kerlevenez, qui accueille deux unités Alzheimer. « Ce budget illustre de belle manière comment nous agissons pour le bien-être des Brestois », résume fièrement Mme Abiven,. Le budget primitif de la ville qui est d’un total de 156 millions d’€, dans les grandes lignes est le suivant :
Généralités :

  • L’économie locale : 66 millions d€.
  • La culture : 17,1 millions d’€, soit 11 % du budget.
  • L’aménagement urbain et le cadre de vie : 12,5 millions d’euros, soit 8 % du budget.
  • Le sport et la vie associative : 9,2 millions d’€, soit 6 % du budget de la ville.
  • La santé, environ 8,3 millions d’€, soit 5 % du budget.

Recettes :
  • Les recettes de fonctionnement atteignent 141,8 millions d’€ en tout.
  • Les recettes de fonctionnement réelles : 5,3 millions d’€ pour 2016.
  • Les recettes fiscales : 71,18 millions d’€. À noter qu’après avoir baissé en 2015, en 2016, les taux d’imposition n’augmentent pas.
  • Reversion de la métropole à la ville : 300 000 € sur le budget primitif 2015, soit au total 2 millions d’€ pour la reversion de la taxe d’électricité.
  • Le produit de la taxe sur les publicités extérieures : 1,4 millions d’€.
  • Produits des services et domaines : 6,1 millions d’€.
  • Les dépenses de fonctionnement : 130,5 millions d’euros. En augmentation de 1,2 % par rapport à l’année 2015.
  • Les dépenses de personnel ont augmenté de 0,9 % ;
  • Les charges de fonctionnement générales ont augmenté de 800 000 €.
  • La subvention versée aux foyers logements ainsi qu’au CCAS (Centre Communal d’Action Sociale) et aux écoles a augmenté.

Dépenses :
  • Les dépenses d’investissement atteignent en tout : 18,1 millions d’€, répartis comme suit :
  • 4,8 millions d’€ pour l’enfance et les écoles.
  • 1,7 million d’€ pour le cadre de vie et les services urbains comme les marchés, les cimetières, etc…
  • 300 000 € versés par la Ville pour les fêtes maritimes comme en 2015.
  • Le délai de désendettement de la ville se situe dorénavant à 3,9 années.

« Ce sont des bases solides et fiables », redit la première adjointe, comme elle l’avait déjà dit au dernier conseil de métropole. Elle certifie que « (notre) stratégie budgétaire est de maintenir les taxes d’habitations au niveau de 2015, et de dégager une capacité d’autofinancement suffisant pour assurer les investissements du mandat ». « Le budget de la ville 2016 tout comme celui de la Métropole contribue au redressement des finances publiques », annonce, rien moins que cela, l’élue socialiste. Elle jure : « Nos investissements sont conformes au plan du mandat ». « Ces investissements sont vecteurs d’emplois », ajoute encore peu modeste Mme Abiven. « N’en déplaise à certains la santé financière de la ville de Brest est bonne », conclut-elle lapidairement, notamment en direction de l’opposition.

Nathalie  Chaline, du groupe des écologistes (EELV) adresse « (nos) reconnaissances pour le travail de l’Adjointe aux Finances, en raison de la diminution des Dotations globales de fonctionnement versées par l’État (DGF) ». Puis s’adressant à l’opposition : « Ce ne sont pas les propositions des candidats de la droite et du centre qui nous rassurent ». Enfin, l’élue écologiste intervient sur un thème cher aux écologistes : le nucléaire, « alors que nous commémorons les tristes anniversaires des 30 ans de Tchernobyl et des 5 ans de Fukushima ». « Environ 190 milliards d’€ sont dépensés pour le nucléaire depuis 50 ans », déplore Mme Chaline. Elle informe l’assemblée municipale que « les charges d’exploitation de ces centrales nucléaires se montent en tout à 9,9 milliards d’euros en 2009 à EDF ». « Le canton de Genève a porté plainte contre la centrale de Bugey, alors il est grand temps de tourner le dos à cette énergie coûteuse et dangereuse ». On peut ajouter aussi que l’Allemagne, qui a radicalement fermé toutes ses centrales nucléaires en 2011, demande à la France d’arrêter celle de Fessenheim en Alsace, la plus ancienne de toutes nos centrales nucléaires.

Mme Nathalie Collovati, de l’autre groupe de l’opposition municipale, Brest Alternative (BA), « remercie Mme Abiven pour la présentation de ce budget primitif 2016 ». Elle rappelle que « la perte de la DGF est de plus de 2,3 millions d’€ ». « Les collectivités doivent diminuer les frais de fonctionnement ». « Or, ajoute l’élu de droite, les charges à caractère général ont augmenté de 4,9 millions d’€ du budget primitif 2015 à celui de 2016 alors que dans le budget primitif de la Métropole ces charges restent stables ». Elle interprète cette augmentation des charges pour la ville du fait « des travaux du nouvel éco-quartier des Capucins et de sa médiathèque, du téléphérique ainsi que des fêtes maritimes ». Elle annonce finalement que « devant tant d’écarts inquiétants entre le budget de Brest Métropole et celui de la ville de Brest, BA votera contre ce budget ».

Mme Jacqueline Héré, Adjointe au maire, élu du groupe communiste, revient sur ce qui fait l’actualité sociale nationale : la réforme El-Khomri du travail. « La réforme du travail fait l’unanimité contre elle », lâche-t-elle. Revenant à l’ordre du jour du conseil municipal, à savoir le budget primitif, elle déplore que « c’est la troisième année consécutive que nous sommes impactés par la baisse des Dotations de l’État aux collectivités locales ». « Notre collectivité continue malgré tout à faire une politique de gauche », estime l’élue d’extrême gauche. Elle cite en exemple « l’EHPAD de Kerlvénez pour plus de 2,9 millions d’€ ». Elle regrette par contre « que les échanges n’aient pas prévalu dans le dossier des subventions aux associations d’éducation populaires ». Il est vrai que la municipalité avait produit un grand couac en décembre 2015 lors de l’annonce de cette mesure en contradiction avec la politique menée depuis le début par la majorité de gauche du conseil municipal envers les associations, et notamment celles d’éducation populaires, si chères d’habitude aux cœur de la gauche. Voir à ce sujet l’article que j’avais écrit à l’époque sur ce blog : « Conseil municipal de Brest : la conjonction des mécontents ».

L’inaltérable élue régionaliste UDB, Anne-Marie Kervern a pris ensuite la parole. Elle a rappelé que la Journée internationale pour les droits des femmes venait d’avoir eu lieu l’avant-veille : « C’est tous les jours le 8 mars ici parce que ce ne sont que des femmes qui prennent la parole aujourd’hui ». Revenant sur les subventions allouées aux associations, « (elle) ne souhaite en aucun cas que la vie associative soit la variable d’ajustement de ce budget ». « Les petites ou les grandes associations contribuent à la vie locale et à la cohésion sociale », rappelle-t-elle. Elle souligne encore que « l’emploi associative représente 11 % des emplois à Brest ». Elle évoque aussi le problème des associations non conventionnelles. « Pendant plusieurs années, le budget des associations non conventionnelles n’a fait que baisser, en 2016 il baisse même de 4 % ». « J’alerte et ce n’est pas la première fois, à travers les associations se joue une société plus humaine. Mais les choix décidés ici sont régressifs à un moment où la demande de solidarité est la plus forte », assène l’élue régionaliste. Elle annonce malgré tout que « c’est parce que j’ai cette confiance que je voterais ce budget ».

Patrick Appéré, Adjoint au sport et élu Autre Gauche Brest Nouvelle Citoyenneté (BNC) juge que si « nos recettes de fonctionnement à la ville comme à la Métropole sont en baisse, les autres recettes évoluent dans le bon sens, mais elles ne parviennent pas à rattraper le recul ». « Nous sommes satisfaits de voir l’enfance, la jeunesse et la vie associative recevoir une bonne partie de cette enveloppe budgétaire », se rassure l’élu de la gauche radicale. « C’est donc plutôt satisfaisant dans un contexte dégradé et de rigueur ». Mais il pointe du doigt « les banques (qui) ont retrouvé l’an passé leurs résultats d’avant la crise de 2008 ». Avant d’évoquer lui aussi la loi El-Khomri et « le million de personnes en France qui ont manifesté contre la loi travail ». « Nous voterons ce budget tout en restant vigilant », conclut-il.

M. Bruno Sifantus (RPB), remet en cause la présentation du budget qui en a été faite par la majorité municipale. Il alarme sur le fait que « Brest est bien marquée par une démographie qui ne cesse de reculer, pour s’établir à moins de 140 000 habitants selon les derniers chiffres officiels 2012 de l’INSEE, et par une activité économique déclinante ». « Vous mettez en avant la stabilité des taux de la fiscalité locale. Il est nécessaire de rappeler que les bases elles augmentent de 1 % au moment où l’inflation reste négative, l’inflation sur un an glissant en février 2016 est en effet annoncée par la Banque Centrale européenne et par l’INSEE à -0,2 % ». Il prédit que « cela se traduira probablement et comme l’an dernier par une augmentation  de fait de la pression sur les contribuables et l’économie, qui s’ajoutera à la pression exercée par les autres strates administratives locales et nationale ».

M. Sifantus conteste aussi « l’effort de maîtrise des charges de fonctionnement ». « Mais les hypothèses retenues pour l’inflation sont, comme pour les impôts, peu réalistes, et cachent de fait des charges qui devraient se révéler bien supérieures à vos prévisions ». « On peut regretter aussi le manque de clarté et de discernement de votre politique de subvention aux associations qui dans vos prévisions contient toujours un objectif de près de -4 % », accuse encore l’élu de droite toujours en posture de Père la Morale. Même la politique de désendettement ne trouve aucune grâce à ses yeux. « Au moment où l’Europe pointe le niveau de la dette publique en France, “qui continue d’augmenter“ et classe le pays dans les cinq derniers des dix huit pays de l’UE qui ont fait l’objet d’un bilan approfondi, la part locale des engagements du contribuable brestois est beaucoup plus forte que l’encours de 44 millions d’€ que vous en montrez ici, et donc plus important que le poids de 305 millions d’€ par habitant mis en avant ».

Il rappelle les chiffres de cette dette : « Permettez-moi de rappeler que l’encours de la dette de la Métropole est d’environ 380 millions d’€ ; que le montant total des garanties bancaires au 1er janvier 2016 de la Ville de Brest est de 160 millions d’€ et celui de Brest métropole de 380 millions d’€. C’est donc bien un montant d’au moins 4 500 € d’engagement par habitant dont il faut ainsi parler, soit bien plus de dix fois la somme officiellement et fort opportunément affichée par habitant ! » Il alerte encore plus compte tenue de la situation de Brest où la « population décline et se paupérise ». « En se référant aux derniers chiffres officiels 2012 de l’INSEE, Brest compte 63 500 foyers fiscaux dont 60 % sont imposés. Le niveau de dette et de couverture représente alors une somme de 19 000 € par foyer fiscal payant l’impôt sur le revenu ».

Bernadette Abiven reproche  à RPB « la fâcheuse habitude de mélanger les torchons et les serviettes ». « Les chiffres que l’on apporte et qui permettent de faire des ratios, ce sont des rations officiels, de la DGSEN, des impôts », corrige-t-elle. « Je vous invite à relire le document que nous déposons sur le site : Brest.fr ». Mme Abiven rappelle que dans ce budget 915 € par habitant sont dépensés. « On fait aussi bien avec moins d’argent », résume-t-elle. « C’est plutôt vertueux et responsable de le faire », ajoute-t-elle.

Michel Talonnec (RPB) annonce : « Je voudrais moi-aussi féliciter Mme Abiven ». On ne sait pas si dans sa bouche c’était sincère ou ironique !

Le conseil municipal a été brutalement interrompu et sans ménagements par des jeunes du collectif « Casss’Papiers » qui ont fait irruption dans la salle du conseil municipal à ce moment.

L’arrivée tonitruante du collectif « Casss’Papiers »

Entre 20 et 30 migrants albanais, démunis, demandent un logement à Brest. Le sous-Préfet de Brest refuse de les loger par peur de voir s’installer la mafia albanaise à la pointe bretonne. « Propos xénophobes », rétorquent les membres du collectif de défense des migrants, « Casss’Papiers ». Une cinquantaine de jeunes à l’appel de ce collectif ont fait irruption dans la salle du conseil municipal par l’entrée réservée au public. Plusieurs de ces jeunes ont rappelé la situation de ces Albanais demandeurs d’asile dans un courrier qu’ils ont lu devant l’assemblée municipale :

M. le Maire,

Nous intervenons aujourd’hui dans votre Conseil municipal pour exprimer notre colère et notre dégoût face à la situation des demandeurs d’asile dont vous avez forcément entendu parler. Rappelez vous, nous étions ici lundi dernier et aussi celui d’avant, nous étions à la sous –Préfecture mardi et nous occupions l’université mardi soir et mercredi.

Cette situation ne doit pas être nouvelle pour vous car elle se répète sans cesse depuis 5 ans et se heurte à votre silence depuis mai 2012. Pour celles et ceux dont les oreilles seraient bouchées, il s’agit d’une vingtaine de personnes maintenues dans une extrême précarité par les pouvoirs publics dont vous faites partie. Malgré de nombreuses sollicitations de la part de ces personnes et leurs soutiens, chacun se renvoie la balle sans proposer aucune solution pérenne. Coallia (organisme de l’État chargé d’aider matériellement les migrants) refusant sa mission d’accueil, la sous-Préfecture refusant catégoriquement de loger ces personnes par peur d’un afflux massif, ce qui est sans “fondement“, c’est à vous, M. le Maire qu’il revient la responsabilité de débloquer en dernier lieu cette situation ».

Ils rappellent qu’une ville, Metz « a été condamnée le 17 novembre 2015 par la Justice et a été sommée de loger toute personne sans abri ».

« Vous êtes donc responsable des populations en détresse sur le territoire de votre commune. On vous renvoie à l’Article 512-2 du Code de l’Action sociale et des Familles stipulant que “toute personne dénuée de ressources et âgée de plus de 16 ans doit recevoir de la commune, dans laquelle elle se trouve, un abri“. Actuellement 6 000 logements sont inoccupés à Brest et vous avez le pouvoir de les réquisitionner pour enfin, résoudre cette situation. Il est aberrant qu’actuellement ce soit l’UBO (l’Université de Bretagne occidentale) qui nous offre un soutien public et un lieu d’accueil, alors que telle n’est pas sa mission (on vous invite à lire le communiqué de presse publié dans le Télégramme du jeudi 10 mars 2016).

Face aux discours xénophobes du sous-Préfet, face à la réponse policière, face à une demande de dialogue avec la mairie, face à la malhonnêteté de Coallia qui n’assume pas sa mission, nous exigeons que vous sortiez de votre mutisme, que vous assumiez vos devoirs de Maire et apportiez une solution immédiate à cette situation. Nous refuserons toute gestion au cas par cas : toute personne doit être logée dignement quelque soit sa situation familiale et / ou administrative ».

Bernadette Abiven tente de leur répondre gentiment : « Deux personnes ont été entendues l’autre jour. Ce qui leur a été proposé  c’est que ceux qui relèvent de l’hébergement, c’est-à-dire les réfugiés fuyant la guerre, puissent l’être. Quant aux Albanais, nous ne les connaissons pas ! Je me suis engagé à saisir le Préfet et les familles sont hébnergées quand un besoin se présente, mais la décision n’appartient pas au maire de Brest », répond la première adjointe au maire. « Des logements pour toutes et tous » scandent alors bruyamment l’attroupement de jeunes présent autour de la partie publique de la salle du conseil municipal mais également tout près de certains conseillers municipaux.

Le maire, M. François Cuillandre, que j’appelle aussi souvent dans mes articles le baron rose de la ville leur répond : « Moi, je comprends les difficultés rencontrées par ces migrants ». Avant de nuancer : «  Il faut faire la distinction entre les migrants économiques qui n’ont pas vocation à rester en France et les réfugiés qui fuient la guerre et / ou la persécution et qui doivent pouvoir être accueillis dignement ici ». « Il y a un moment où il faut se respecter mutuellement », juge M. le Maire. « On vous respectera quand vous nous respecterez », lance un des manifestants. « Je n’ai jamais refusé des rendez-vous quand ils sont demandés », explique François Cuillandre. Avant d’ajouter : « Je comprends la détresse, les drames d’autres personnes venant d’autres pays et qui sont en demande d’asile, surtout lorsqu’il y a des enfants ». Puis il argumente : « Sur les migrants, nous avons proposé à l’État des places qui sont encore disponibles. Moi je crois au partage des responsabilités en matière politique et l’État a une responsabilité en la matière. La responsabilité incombe donc à l’État à travers sa structure Coallia ».
–« Arrêtez de parler d’État, l’État c’est vous aussi », lui rétorque un des jeunes radicaux.
-« Quand vous dites que BMH (Brest Métropole Habitat, le bailleur social de Brest) a des logements vacants, ce sont des logements vacants de façon très épisodique et qui sont en attente d’autres locataires. Nous avons à BMH 2 000 demandes de logements émanant de familles brestoises ou du pays de Brest non pourvues », fait comprendre le maire.

« BMH a des logements vides, ils peuvent être réquisitionnés tout de suite pour loger tous les demandeurs d’asile », n’en démord pas un des membres du collectif anarchiste. Un autre lance à M. le Maire : « Arrêtez de vous cacher derrière vos adjoints, prenez vos responsabilités, vous avez le pouvoir de réquisitionner des logements vides ». « Il y a des élus communistes je crois dans cette assemblée, ils sont où leurs idéaux de partage et de solidarité ? », demande encore un autre jeune.

Devant le mutisme assourdissant du maire et des conseillers municipaux (excepté Mme Julie Le Goïc), les défenseurs des migrants font venir deux personnes habillées en clown devant M. le Maire. L’un apporte même avec lui une jeune fille déguisée en licorne ! « Tout est possible, si on a trouvé une licorne dans la rue on peut trouver des logements pour les demandeurs d’asile », lance alors le garçon clown. Puis il apporte un petit miroir devant François Cuillandre pour voir si ce dernier peut se regarder dans la glace. « J’ai une bonne nouvelle à vous annoncer, M. le Maire s’est regardé dans le miroir », crie encore le clown.

Une collaboratrice du groupe RPB assise dans la partie publique a fait un malaise et a due être évacuée de la salle par les pompiers.

 Bref, le dialogue de sourds a duré plus de 3h.

Au total, si le conseil municipal était agité hier ce n’était pas tant par la vindicte habituelle de l’opposition municipale que par la violence du blocage inadmissible du conseil municipal provoqué par des membres du collectif Cass’Papiers, ne respectant même pas les normes démocratiques et légales en ayant interrompu le conseil municipal, en faisant parler en anglais une jeune fille menaçant d’actes violents en cas de refus de logements en plus dans son intervention orale dans la langue de Shakespeare, en apostrophant le maire. Celui-ci a été traité de « social-traître » par les jeunes très remontés de ce collectif extrémiste. « Cela fait depuis des mois que vous vous esquivez de vos responsabilités de maire, il y a des gens qui crèvent dehors », hurle un des jeunes radicaux envers le maire.

Marc Gidrol

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