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Un Conseil de Brest Métropole houleux sur fond d’extension du Leclerc

Brest Métropole s’est réuni en Conseil vendredi 16 décembre. Et, le moins que l’on puisse dire c’est que à quelques jours des fêtes de fin d’année, la magie de Noël n’opère pas à Brest. L’assemblée du conseil métropolitain s’est disputée sur la sempiternelle question des dotations, mais aussi de l’extension du Centre Leclerc de Gouesnou-Kergaradec. 

En premier lieu il a été validé le transfert de compétences de l’État vers la métropole par le « Pacte État - Brest Métropole » avec la Caisse des Dépôts et Consignations et le Conseil Régional. Rentre dans ce champ de compétences tout ce qui relève du domaine maritime. Brest étant « un pôle d’excellence maritime », rappelle François Cuillandre, le Président de Brest Métropole et maire de Brest même. Avec deux vitrines de cet excellence à Brest : Océanopolis et le plateau des Capucins. Brest est qualifié de « campus mondial de la mer ». « L’État met 150 millions d’€ sur la table pour Brest Métropole », expose François Cuillandre, le maire de Brest et Président de BM. 

Il a été décidé aussi la création sur Brest d’un institut dépendant de l’ONU, dédié à la protection des océans. Par ailleurs, en lien avec cette délibération, des compétences du Conseil départemental sont transférées aussi à BM, comme une partie de la voirie départementale (44 km). François Cuillandre rappelle que par exemple « la route de Gouesnou c’est de la voirie départementale parce que la ville s’est étendue à ce secteur de Brest après la construction de cette route ».

Mme Bernadette Malgorn, toujours en meneuse du groupe d’opposition municipale et métropolitain, Rassemblement Pour Brest (RPB), a attaqué le Président de Brest Métropole et sa majorité sur leurs choix urbanistiques. Elle rappelle les fausses promesses du candidat Hollande et au passage sa proximité avec François Cuillandre. Promesses sur « un pacte de confiance et de solidarité (…) entre l’État et les collectivités locales garantissant le niveau des dotations qui devait être conclu d’après la proposition de l’actuel Chef de l’État le 3 mars 2012 à Dijon »

Mme Malgorn rappelle aussi que François Hollande « dès septembre 2012, (il) opère un recul en arrière toute ». Elle condamne alors l’entêtement du responsable de l’agglomération brestoise à garder les mêmes projets et à ne pas « intégrer la baisse des dotations comme une perspective durable qui devait éclairer toute prospective pour nos collectivités ». François Cuillandre lui répond alors : « Pour vous il faut mettre la ville sous cloche et crever »

La cheffe de file de la droite et du centre brestois, Bernie La Matraque (autre surnom de Bernadette Malgorn hérité du temps où elle était Préfète de la région Bretagne), dégaine encore sa matraque contre le maire et président de BM. Elle remet en cause le mode de décision de l’équipe dirigeante se faisant sans « le contrôle démocratique par les conseils élus ». « Nous pensons que la définition de nos ambitions en la matière aurait dû être débattue ensemble au sein de notre conseil, sur la base de la vision stratégique que nous pouvons avoir pour l’avenir de la pointe bretonne », regrette-t-elle. 

Mme Malgorn reproche aussi le côté obscur du « fameux ou plutôt fumeux concept de maison commune dont on ne sait rien, si ce n’est que sa première assemblée générale a été annulée par deux fois ». Puis elle énumère les deux réunions annulées : « Le 9 juin 2016, visiblement nous étions les seuls (le groupe RPB, NDLR) à ne pas être avertis, trouvant porte close à l’espace Kéraudy de Plougonvelin et la deuxième prévue le 23 novembre, salon Richelieu, et annulée le 22 novembre par mail, à 8 h 54, sans plus d’explications ». « S’il s’agit de mettre en cohérence l’action des collectivités et de leurs satellites, exclure les élus métropolitains d’une telle démarche relèverait du déni de démocratie ». 

Monsieur Jean-Luc Polard, de la majorité municipale et métropolitaine, 6ème Vice-Président de BM, en charge des services à la population, du commerce et de l’artisanat, répond à Mme Malgorn sur les « satellites (qu’ils) ne font que tourner en l’air ». « Elle aussi », lance François Cuillandre à l’adresse de Bernie La Matraque. Jean-Luc Polard précise que les satellites « ce sont les opérateurs ». « Quant à la maison commune n’y sont invités que les membres de ces Sociétés Publiques Locales (SPB) », ajoute M. Polard. 

Mme Malgorn, revenant à la charge accuse encore le président de BM de baisser « les taux de la ville de Brest en augmentant à due concurrence la charge sur les contribuables métropolitains ». « On est bien loin de l’intérêt général de la métropole, de la pointe bretonne et de l’avenir de ses habitants . Ce qui devrait être notre loi commune », conclut pince-sans-rire Mme Malgorn. 

Le Conseil a voté aussi, en remplacement de Christian Guyonvarc’h, Gurvan Moal, maire sortant de Guipavas, comme 15ème Vice-Président de BM avec les mêmes compétences que M. Guyonvarc’h, l’urbanisme et le commerce.

L’opérateur délégataire de service public, Brest’Aim, sera chargé par ailleurs de gérer, d’exploiter et d’animer les ports de plaisance du Château et du Moulin Blanc ainsi que la Goélette La Recouvrance. BM concourra à hauteur de 400 000 € en tout par an dont 274 000 € pour l’intendance de la Recouvrance.

La métropole a validé la modernisation du matériel d’exploitation et des équipements des parcs de stationnement public de l’agglomération et notamment le renouvellement des horodateurs en prenant en compte le paiement par carte bancaire, qui existe quand même depuis pas mal d’années ! Marc Berthelot (groupe RPB, opposition municipale) en profite pour souligner « le déséquilibre de l’espace public et des prix de stationnement pratiqués ». « Le problème est prégnant rue Saint Yves derrière le TGI ( Tribunal de Grande Instance) où des voitures sont garés en double, triple ou quadruple files de stationnement », expose-t-il. Il affirme aussi à propos du stationnement gratuit au centre-ville de Brest le samedi de 9 h à 14 h, « vous avez inventé le stationnement gratuit payant, car des automobilistes ont reçus des contraventions pour défaut de paiement de stationnement le samedi matin ». Jean-Luc Polard a assuré qu’il allait étudier ce problème.

Le maire de Guilers, Pierre Ogor (Les Républicains), a poussé un coup de gueule contre ce qu’il appelle le « chaussidou » : « Ce que j’ai à parler, c’est d’un sujet sérieux, c’est le chaussidou, inventé par les Suisses. Cela consiste à élargir les pistes cyclables, ce qui revient à réduire les voies dévolues à la circulation automobile. C’est là que le chaussidou intervient, vous vous rabattez sur la voie cyclable en cas de croisement avec un poids lourd en espérant qu’il n’y ait pas un cycliste en même temps à circuler"

Autre coup de gueule du tonitruant Pierre Ogor, le DIF (Droit individuel à la formation), que tous les élus politiques (nationaux ou locaux) paient sur leurs indemnités et qui est censé servir pour leur reconversion professionnelle après leur vie d’élu : « Trop c’est trop. On a été racketté sur nos indemnités légales, car nous sommes taxés à hauteur de 1 %. Je trouve ça scandaleux, parce que nous avons le droit à avoir la liberté de ce qu’on fait de nos indemnités et du choix de la formation professionnelle ou du métier que l’on fait après avoir été élu politique avec cet argent ou pas »

Encore un autre motif de colère du maire de Guilers, le choix d’implanter le nouveau chenil de la SPA pour les animaux abandonnés et vagabondants sur un terrain de sa commune. « Le gros matou avait sorti les griffes la dernière fois, cette fois-ci il sort les fourches ». « Notre conseil municipal a dit non à l’unanimité à ce projet », annonce Pierre Ogor. Et de proposer à la place l’ancien chenil de Plouguerneau « prêt à accueillir cette structure d’accueil pour les animaux ». François Cuilleandre bondit tel un agile félin en attendant cette proposition : « Imaginer une fourrière à Plouguerneau c’est une vue de l’esprit ». « Pour la fourrière du petit Minou, c’est le Conservatoire du littoral qui nous a demandé de partir », justifie monsieur Cuillandre. Pour lui « le terrain à Guilers était à (nos) yeux le terrain idéal. Ce refus c’est de l’égoïsme communal », proteste l’édile de la métropole. Aux yeux du "gros matou", Pierre Ogor, « il y a un intérêt personnel et financier de certains pour ce terrain à Guilers pour la SPA ».

Alain Masson de la majorité métropolitaine revient sur les problèmes du téléphérique depuis la mise en service en novembre dernier. Il rappelle que c’est « le 30 novembre au matin (que) la coupure de courant électrique lors du rabotage du téléphérique a provoqué l’ouverture des portes du téléphérique en l’air avec un agent à bord ». « La société BMF travaille sur un dispositif définitif dont l’installation devrait avoir lieu au cours de l’été 2017 », période de remise en fonction du téléphérique, pas avant !

Le conseil métropolitain a approuvé aussi la réalisation de la nouvelle ZAC de Mescadiou à Gouesnou et le programme des équipements sur cette ZAC. Ce sera une zone artisanale, de services et de PME-PMI à l’exception de tous commerces de détails. Le montant de la réalisation de cette zone se monte en tout à 3 586 900 € dont 64 000 € de participation financière de la part de Brest Métropole. Stéphane Roudaut, le maire de Gouesnou, déclare que « Gouesnou est amie des entreprises et de tous les entrepreneurs et chefs d’entreprises qui voudront s’installer à Gouesnou ». 

La métropole a donné son feu vert à l’extension du Centre Lerclerc de Gouesnou-Kergaradec, puisque cela se ferait en conformité avec le plan local d’urbanisme de BM. Stéphane Roudaut a rappelé que « l’agence de l’autorité environnementale a reconnu en mars 2016 la validité du projet et (que) le commissaire-enquêteur a émis un avis favorable le 2 décembre dernier ». « Ce programme s’inscrit dans la modernisation du site commercial par la restructuration d’une de ses locomotives, l’hypermarché Leclerc », ajoute le jeune maire de Gouesnou. 

Bernadette Malgorn, émet de la part de son groupe des réserves compte tenu de « la conjoncture commerciale de l’agglomération ». Même tonalité chez les élus Europe Écologie-Les Verts (EELV) par la voix de Ronan Pichon : « Cet élargissement ne va pas dans le sens du renforcement des commerces du centre-ville ». Il rappelle que « les centres-villes se vident de leurs commerces avec un taux de vacance record qui atteint désormais le seuil symbolique des 10 % pour l’ensemble du pays ». « De plus, en plus de l’impact environnemental et économique sur les commerces de centre bourg, d’un point de vue macroéconomique, c’est une hérésie d’ouvrir de nouveaux mètres carrés commerciaux car la consommation progresse très peu et l’e-commerce (ou commerce électronique) se développe », pointe du doigt aussi l’élu EELV.

Un duel Roudaut-Malgorn a lieu dans l’enceinte du Conseil de BM tout de suite après l’intervention de M. Pichon. C’est Stéphane Roudaut qui s’emporte contre Mme Malgorn car cette dernière avait insinué que l’agrandissement de cette zone était pour une nouvelle galerie marchande : « Je veux dire stop à ces petits calculs qui cherchent à nuire d’abord pour en retirer un bénéfice politique ensuite ». « Mme Malgorn vous agitez le chiffon rouge avec cette extension du centre commercial de Kergaradec ». Il rappelle, furieux qu’ « un élu de RPB a rencontré des commerçants en secret ». « Oui, Mme Malgorn je suis en colère, écoeuré ». 

Appuyant là où cela fait mal, Stéphane Roudaut en vient à évoquer Mme Bourbigot, conseillère départementale du canton de Kergaradec et élue municipale dans le groupe de Mme Malgorn : « La conseillère départementale, Mme Bourbigot soutient-elle votre démarche ? Elle est du canton ». « Vous êtes hors-sujet depuis le début parce qu’il n’a jamais été question de galerie marchande », vitupère encore monsieur Roudaut. « Quand on a une question légitime on ne peut pas continuer à faire croire que le Centre Leclerc de Gouesnou bénéficie de passe-droits ». Il va même jusqu’à accuser Mme Malgorn de poujadisme : « Il y a du Pierre Poujade dans vos propos, Mme Malgorn ». Accusation très grave pour une élue se voulant être du camp républicain. Pierre Poujade est cet homme politique et syndical proche de Jean-Marie Le Pen et de l’extrême droite française qui s’est illustré dans les années 50 et 60 par sa défense des petits commerçants et artisans contre l’apparition des nouveaux super et hypermarchés. 

Mme Malgorn, mise à mal par l’accusation de Stéphane Roudaut, pour sa défense considère que « l’investissement de Monsieur Roudaut explique cette chaleur pour Monsieur Barral (le nouveau PDG du Centre Leclerc, NDLR) et le contraire pour (moi) ». « Sur le point de rupture commerciale nous n’avons pas reçu de réponse satisfaisante », justifie-t-elle son vote encore.

Au total, ce fut un Conseil de gestion traditionnel de fin d’année mais houleux aussi, notamment lors de la passe d’armes entre Stéphane Roudaut et Bernadette Malgorn ou encore entre Pierre Ogor et François Cuillandre. Le commerce est toujours un sujet sensible à Brest, où le centre-ville connaît un déclin de ce point de vue depuis quelques années. La droite brestoise accusant la majorité locale de ne pas en faire assez pour l’attractivité commerciale. Il n’y a donc pas de trêve des confiseurs pour les politiques brestois !


Marc Gidrol

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