Des manifestants au conseil municipal du 17 décembre 2015, en arrière-plan une banderole pour la défense du collège Kérichen. Photo : Marc Gidrol. |
Le dernier conseil municipal de
Brest s’est tenu jeudi 17 décembre. Des manifestants contre la baisse des
subventions de la mairie aux associations de l’ordre de 4 % pour les années
2015-2020 ainsi que les représentants des parents d’élèves et des enseignants
du collège Kérichen se sont invités à ce conseil.
En guise d’ouverture, Julie Le
Goïc (EELV) a tenu à faire le bilan de l’année 2015, « année bien pourrie », selon cette
dernière. « L’état d’urgence
débouche sur l’arbitraire par des perquisitions, des assignations à résidence
injustifiées de militants écologistes en marge de la COP 21», lâche-t-elle amèrement.
« Au final, nous nous retrouvons à
l’issue de ces élections régionales, avec un ministre de la guerre qui cumule,
tout comme 45 % des élus bretons », juge-t-elle encore sévèrement.
Elle émet une crainte, celle de « subir
une politique libérale et sécuritaire engagée par ce gouvernement
socialiste ». Quant à l’opposition brestoise, elle a décoché des
flèches en sa direction aussi. Et tout particulièrement en direction de
Bernadette Malgorn (Rassemblement pour Brest, RPB) : « Le Front national est monté en flèche à
Brest à cause de Mme Malgorn qui a adopté ses thèses. Je ne comprends pas
l’attitude de Mme Malgorn, je ne sais pas si elle veut être ministre de Manuel
Valls ? » Bernadette Malgorn et Bruno Sifantus protestent.
Le collège de Kérichen
Véronique Bourbigot
(Rassemblement pour Brest, RPB) a rappelé le vœu que son groupe a rédigé pour
le maintien du collège de Kérichen. En effet, le groupe RPB s’est emparé de
cette question qui agite la municipalité depuis le 17 septembre dernier, date
de la décision de la fermeture de ce collège par l’Académie de Rennes et le
Conseil départemental du Finistère. Mme Bourbigot annonce que le « RPB a donc déposé un vœu afin que chaque
élu de notre assemblée délibérante puisse se prononcer et défendre unanimement
l’intégrité de cette cité scolaire, ancrée dans l’histoire brestoise et bien
connue sous le diminutif de Kérich’ ».
Le vœu de RPB rappelle que « le collège de Kérichen fait partie
d’un ensemble cohérent qui permet d’effectuer l’ensemble d’une scolarité dans
un même secteur de l’agglomération, avec un dispositif pédagogique allant de la
maternelle au lycée classique, technique et professionnel et également en
formation post-bac ». Notant par ailleurs que ce collège « s’insère dans une zone d’habitat tant
collectif par du privé et du public que pavillonnaire (…) avec une grande variété de catégories socio-culturelles
et socio-professionnelles (…) la fermeture
du collège de Kérichen aurait des incidences profondes sur la vie des quartiers
concernés (…) ainsi que des
conséquences sur la qualité du dispositif éducatif sur ce territoire avec une
obligation de répartition des 280 élèves scolarisés sur l’établissement ».
Les élus RPB alertent que « le collège de Pen-ar-Chleuz, seul en mesure
d’accueillir la majorité des élèves issus des secteurs Montaigne-Kérichen,
Kérinou et Pontanézen, verrait sa population scolaire croître dans des
proportions en contradiction avec l’objectif optimum affiché par le ministère
de l’Éducation nationale et rappelé par le Conseil départemental du Finistère
qui est de 450 élèves par établissement ». « Le projet de fermeture du collège mettrait donc en difficulté les
collèges avoisinants et serait contraire aux engagements pris par notre
collectivité dans le cadre de son Contrat de ville du territoire de Brest
métropole 2015-2020 », stipule le vœu de RPB. « En conséquence, le Conseil municipal de
Brest se prononce contre la fermeture du collège de Kérichen »,
exigent les élus RPB. Véronique Bourbigot rappelle aussi dans son intervention
que « les établissements du secteur
concerné sont situés dans une zone où se cumulent des difficultés sociales et
d’intégration ». Elle préconise : « Plus qu’ailleurs, il faut y mettre plus d’humain, plus de doigté, plus
de médiation ».
Marif Loussouarn (EELV), au nom
du groupe écologiste apporte son soutien « à toutes les mesures permettant de ne pas fermer le collège de Kérichen ».
Tandis qu’Éric Guellec au nom du groupe des élus communistes, prévient : « Notre groupe et l’UDB, nous ne voterons pas
le vœu de Mme Malgorn ». « C’est
de la récupération électorale », juge-t-il. Tout en admettant que
« la fermeture du collège Kérichen
n’est pas une bonne chose ».
Pancartes tenus par les manifestants contre la baisse des subventions aux associations d'éducation populaire. Photos : Marc Gidrol. |
La grogne des associations
Autre motif d’insatisfaction ces
jours-ci à Brest, la baisse de 4 % des subventions allouées par la municipalité
brestoise aux associations d’éducation populaire. Ce qui représente tout de
même une perte de plus de 4 millions d’euros rien que pour l’année 2016. À ce
sujet, M. André Schléret, président de la société des patronages laïques
municipaux a lu une lettre ouverte au maire. Voici des extraits de cette
lettre :
« Monsieur le Maire, j’interviens au nom de l’ensemble des
associations d’éducation populaire brestoises ayant passé convention d’objectif
avec la ville de Brest. Par courrier en date du 20 novembre 2015, vous nous
informez des difficultés que connaissent les collectivités locales pour
finaliser les budgets des années 2016 et suivantes. Si nous comprenons les
analyses que vous faites et sommes prêts à contribuer à l’effort global, nous
sommes particulièrement choqués de la manière dont cela nous est présenté. En
effet, c’est le 9 décembre que nous avons été informés du contenu de l’avenant
présenté à ce conseil municipal du 17 décembre. Nous n’avons eu aucune réunion
pour échanger sur les nouvelles modalités que vous mettez en œuvre et qui sont
lourdes de conséquences pour nos associations. (…) Nous souhaitons que les moyens de base soit “sanctuarisés“,
c’est-à-dire que vous teniez compte du fait que ces ressources sont destinées à
financer des charges de personnel et que les corrections nécessaires soient éventuellement
faites sur les autres aspects du contenu de la convention qui lie la ville de
Brest et notre association depuis des décennies et plus particulièrement celle
signée en 2013. Les propositions faites modifient sensiblement le contenu même
de la convention en cours, et particulièrement l’article 20 – Avenant – qui
précise “toute modification des conditions ou modalités d’exécution de la
présente convention, définie d’un commun accord entre les parties, fera l’objet
d’un avenant. Celui-ci précisera les élèments modifiés de la convention, sans
que ceux-ci ne puissent conduire à remettre en cause les objectifs généraux définis
dans la présente convention“. Et donc, que penser de la dénonciation
unilatérale que vous faites de l’article 9 de la convention en vigueur jusqu’au
31 décembre 2015 ? Est-elle de nature à renforcer la confiance nécessaire
aux prochaines négociations de conventionnement, si l’impression est donnée que
la Ville de
Brest ne se sent pas contrainte de respecter la signature de son maire ?
En conséquence, Monsieur le Maire, nous vous demandons de ne bien vouloir
retenir que les articles 1, 2 et dernier de l’avenant proposé au vote du
conseil municipal et de tout mettre en œuvre pour que de véritables échanges se
déroulent dans les prochaines semaines afin d’aboutir a un accord consensuel ».
L’opposition brestoise (RPB)
s’empare aussi de ce sujet par la voix de Rémi Hervé. « Vous n’avez que trop gaspillé l’argent du
contribuable, les exemples sont légions. Aujourd’hui ce sont les associations
d’éducation populaire qui en font les frais comme d’ailleurs la qualité du
patrimoine municipale. (…) Il prédit que « la baisse de 4 % aura des impacts majeurs sur le fonctionnement
et les activités de ces associations ». « Je rappelle que 400 salariés y sont employés et qu’elles
comptent 25 000 usagers ». « La priorisation des dépenses municipales devrait aller à la réfection
des locaux comme les toitures, les murs, au bon fonctionnement des associations
d’éducation populaire et non dans le financement de projets pharaoniques »,
comme le téléphérique, le plateau des capucins et sa grande médiathèque, la
seconde ligne de tram, etc., sous-entend-il.
Patrick Appéré du groupe l’Autre
Gauche, Brest Nouvelles Citoyennetés (BNC) se veut rassurant : « La négociation doit se poursuivre et des
solutions doivent être trouvées ». Mais il regrette qu’ « on a tergiversé et (qu’)on est face à une manifestation de nos amis ».
« On aurait dû régler cela avant,
cependant il y a des contraintes financières et il faut y faire face »,
ajoute M. Appéré.
Marc Sawicki, adjoint au maire,
en charge de la politique éducative explique : « Nous ne sommes pas riches, ni pauvres non plus mais nous n’avons pas
les mêmes moyens que d’autres agglomérations ». Et M. Sawicki rappelle
que « la politique éducative, c’est
notre premier budget ».
Anne-Marie Kervern (UDB) admet
que « les associations souffrent
dans un contexte de crise ». « La réforme territoriale risque d’aggraver la situation avec
l’encadrement des compétences partagées ». Elle énonce : « Partage, échanges, mises en commun ne sont
pas des mots tabous ». « Se
transformer pour pouvoir mieux agir sur les transformations du monde, c’est un
des enjeux pour les associations », déclare-t-elle. « Liberté ou contrainte, c’est ce qui fait
toute la différence dans un partenariat. Au nom de l’UDB, je vous demande un
délai et faute de délai je m’abstiendrais sur cette délibération »,
prévient l’élue régionaliste.
Jean-Luc Polard résume :
« Il y a unanimité pour souligner
l’importance de l’éducation populaire. Après il y a des différences sur la
prise en compte de la réalité et des contraintes budgétaires ». Au
passage il tacle lui aussi l’opposition brestoise : « La personne de l’opposition (ndlr, Rémi
Hervé) qui est intervenue sur cette
question s’est toujours opposée aux budgets des associations d’éducation
populaire ». M. Polard et le maire, M. François Cuillandre, reprochent
notamment les propos tenus par la droite brestoise aux cours des mandats
précédents sur l’éducation populaire. Bernadette Malgorn répond que « ce n’était pas (son) groupe qui tenait ces propos »
mais l’ancien groupe d’élus d’opposition dans l’ancienne mandature. « C’était votre ami, Laurent Prunier, M. le
maire », s’adressant à François Cuillandre. Yann Masson informe qu’ils
ont commencé à travailler en mars-avril ». François Cuillandre se
défend : « Personne ici ne
peut ignorer les difficultés des finances publiques et on ne peut pas laisser
la charge aux générations futures qui n’en sont pas responsables ».
« Les dotations aux collectivités
locales, c’est le budget le plus important après la dette de l’État »,
informe-t-il. La baisse des dotations de l’État à Brest représente 2,2 millions
d’€ / an de 2015 à 2017 inclus. À titre de comparaison, la ville avait reçu
36,4 millions d’€ de dotations de l’État en 2014, en 2016 elle n’en aura plus
que 30 millions.
« Certains à droite demandent d’aller plus loin dans la baisse des
dotations de l’État », prévient M. Cuillandre. « Face à ce problème, on peut avoir deux attitudes, soit augmenter les impôts
locaux, mais l’assiette de recouvrement et le taux sont déjà supérieurs à ce
qu’ils sont dans les autres communes alentours, soit baisser les dépenses pour
rétablir l’équilibre », stipule-t-il. « Le service public doit s’adapter aux changements et c’est le cas
ici ». Il finit par lâcher comme concession aux représentants des
associations d’éducation populaire présents dans la salle du conseil
municipal : « À ma demande
sera proposé un amendement demandant le report de la mesure pour 2016 ».
C’était le dernier conseil
municipal de l’année 2015, mais on peut dire qu’il restera dans les annales. Si
les élus locaux continuent aussi à bafouer leurs promesses de campagne
électorale, il n’est pas sûr que la montée du vote Front national cesse à
Brest. Rappelons qu’il a obtenu 17 % des voix au second tour des élections
régionales le 13 décembre dernier. Score qu’il n’a jamais obtenu à Brest. Mais
c’est une tendance générale en Bretagne et en France que la montée des scores
du parti d’extrême droite aux élections.
Marc Gidrol
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