Accéder au contenu principal

Du mythe de la franc-maçonnerie secrète

Symboles de la franc-maçonnerie. Source de l'image : herodote.net

Des pirates informatiques ont volé 6 000 fichiers sur les « frères » de la loge maçonnique : la Grande Loge de France (GLDF), une des principales obédiences maçonniques en France, en mars et en ont divulgué le contenu sur Internet sous le titre provocateur « Franc-maçonnerie papers ». La Grande Loge de France a été créée en 1894. D'obédience masculine, elle est adogmatique mais elle oblige ses membres à se référer au Grand Architecte de l’Univers. Son rite est écossais ancien accepté.


L'affaire a été révélée la semaine dernière par l'hebdomadaire d'informations, L'Express. Les pirates informatiques, sur le modèle des lanceurs d'alertes, veulent dénoncer des supposés complots auxquels se livreraient les franc-maçons. Comme quoi le mythe de la franc-maçonnerie manipulant dans l'ombre les peuples marche encore à plein régime. L'occasion pour nous de nous replonger dans l'Histoire et de s’apercevoir que ce mythe a la vie dure.


La franc-maçonnerie, née en France au XVIIIème siècle sur le modèle anglais, a toujours été vue comme une société secrète. Ce qu'elle est aussi avec ses rites, ses symboles, son fonctionnement, l'identité de ses membres, etc., gardés pendant longtemps jalousement secret par rapport aux "profanes", c'est-à-dire les non-membres de la franc-maçonnerie. De nos jours, les membres d'une loge franc-maçonne peuvent révéler publiquement, si ils le souhaitent, leur appartenance à la franc-maçonnerie. Des hommes politiques ont révélé leur affiliation à une obédience : ainsi, Xavier Bertrand chez Les Républicains et François Rebsamen pour le Parti Socialiste, ont divulgué tous les deux qu'ils étaient "frères" du Grand Orient de France (GOF).


Dès les débuts de la IIIème République, et surtout après la crise institutionnelle du 16 mai 1877 entre le Président Mac-Mahon, monarchiste et la majorité républicaine de la Chambre, la franc-maçonnerie est perçue comme le cerveau du nouveau régime et surtout comme une coterie visant à abattre les valeurs de « l'ancienne France », celles de l'Ancien Régime, avec la monarchie et la religion catholique — n'oublions pas que depuis le Moyen-Âge la France est considérée comme la fille aînée de l'Église. Ce sentiment est très exacerbé au moment de l'affaire Dreyfus, entre 1894 et 1899. C'est le moment aussi où est rédigé un faux grossier, Les Protocoles des Sages de Sion, par un agent russe à Paris au service de l'Okhrana, la police secrète tsariste. Ce texte tendrait à prouver que les Juifs et les Franc-maçons alliés main dans la main chercheraient à conquérir le pouvoir en manipulant les foules telles des marionnettes.


Ce texte paraît en Russie en 1903 puis en Europe de l'Ouest à partir de 1920. Il a de nos jours encore une portée non négligeable dans certains pays musulmans comme en Arabie Saoudite ou en Iran par rapport au sionisme et à la création de l'État d'Israël en 1948. Dans la traduction française, ce torchon antisémite comprend une centaine de pages, réparties en vingt-quatre chapitres ou "conférences" qu'aurait tenu un gouvernement juif de l'ombre, "les Sages de Sion".


Voici quelques extraits évoquant la marche à suivre pour la domination mondiale par les membres de cette société secrète :


« Je puis aujourd'hui vous annoncer que nous sommes déjà près du but. Encore un peu de chemin, et le cercle du Serpent symbolique (qui représente notre peuple) sera fermé. Quand ce cercle sera fermé, tous les États de l'Europe y seront enserrés, comme dans un fort étau. […]
« Nous apparaîtrons comme des libérateurs de ce joug à l'ouvrier quand nous lui proposerons d'entrer dans les rangs de cette armée de socialistes, d'anarchistes, de communards, que nous soutenons toujours sous prétexte de solidarité entre les membres de notre franc-maçonnerie sociale ».(Troisième Protocole)


Ainsi la collusion entre francs-maçons et Juifs dans cette guerre de l'ombre contre l'image de la France que s'en font les Catholiques intégristes, les monarchistes et extrémistes de droite de tout poil est clairement établie.


« Quand nous aurons créé par tous les moyens cachés dont nous disposons à l'aide de l'or, qui est tout entier entre nos mains, une crise économique générale, nous lancerons dans la rue des foules entières d'ouvriers simultanément dans tous les pays d'Europe. […] (Quatrième Protocole)


Elles ne toucheront pas les nôtres ; parce que le moment de l'attaque nous sera connu et que nous aurons pris des mesures pur garantir les nôtres ». « Les mêmes principes nous guideront qui ont donné à ce jour à nos sages la conduite des affaires mondiales. Nous dirigerons la pensée de toute l'humanité ». (Vingt-quatrième Protocole). Ces extraits des Protocoles des Sages de Sion sont tirés du n°3 des Collections de L’Histoire, à la page 17.


Toujours dans la même veine toute une littérature fumiste poursuit cette confusion entre franc-maçonnerie et Juifs jusqu'à nos jours. Un journal antimaçon et antisémite, La Libre Parole, fondé par Edouard Drumont, antisémite notoire !, présente la franc-maçonnerie comme l' « instrument de la juiverie » en 1934.


Les franc-maçons sont l'objet de persécutions même après la débâcle de mai-juin 1940, sous la double attaque du régime de Vichy en zone libre et de l'occupant allemand en zone occupée. Les loges maçonniques à Paris et en provinces sont fermées et occupées par l'occupant. Ainsi, la loge du Grand Orient de France est occupée par le Sicherheitdienst, le service de sécurité du IIIème Reich à Paris. Une grande partie des archives maçonniques a été perdue lors de cette période noire pour la franc-maçonnerie et pour le monde d'une manière générale.


Ce sont les Allemands qui font main-basse sur une grande partie des archives maçonniques. Ces archives volées sont transférées à Moscou par l'Armée rouge lors de la défaite des Allemands en 1945 avant de revenir aux loges maçonniques à Paris le 23 décembre 2000 pour le plus grand plaisir des francs-maçons, des historiens et des citoyens curieux d'en apprendre plus sur ces sociétés qui ne sont plus si secrètes que cela contrairement à ce que l'on pourrait croire. Ces documents restitués peuvent d'ailleurs être consultés à la Bibliothèque de France ou dans les loges maçonniques elles mêmes. Les archives départementales ou municipales en province contiennent aussi d'importants fonds d'archives concernant la franc-maçonnerie.


Ce vol de fichiers de la Grande Loge de France relève plus d'un fait anecdotique visant à faire le buzz que d'une révélation fracassante sur la franc-maçonnerie. J'ai d'ailleurs cherché sur le net ces fameux fichiers. Que nenni. Je n'ai rien trouvé, le ménage a dû déjà être fait. D'ailleurs la Grande Loge de France a porté plainte contre x pour le vol de ces fichiers par piratage informatique.


D'autres informations sur le blog d'un journaliste spécialisé sur la franc-maçonnerie : http://blogs.lexpress.fr/lumiere-franc-macon/2016/04/13/la-gldf-porte-plainte-pour-piratage-informatique/


Marc Gidrol

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

« Colère de Brest ! L’humain d’abord » dévoile sa liste.

Les 10 premiers candidats de la liste "Colère de Brest ! L'humain d'abord", samedi 15 février, devant les marches de la mairie de Brest. Comme prévu, la liste « Colère de Brest ! L’humain d’abord » a dévoilé la composition de sa liste, notamment les 10 premiers noms, samedi 15 février. Voici ceux-ci : Quentin Marchand, 28 ans, Assistant d’éducation, quartier du Centre. Christine Panaget-Le Roy, 52 ans, Salariée association, quartier du Pilier-Rouge. Julien Delbende, 39 ans, Sans emploi, quartier du Centre- Saint Michel. Josette Brenterch, 62 ans, Retraitée de l’Éducation nationale, Bellevue. Hubert Casel, 57 ans, Ingénieur, Recouvrance. Sylvie Gourmelen, 62 ans, Aide Soignante, Recouvrance. Antoine Larfaoui, 22 ans, Étudiant, quartier de Saint-Martin. Anne-Marie Alayse, 63 ans, Cadre de recherche, Bellevue. André Garçon, 60 ans, Technicien Télécom, Saint-Marc. Monique Le Guillou, 63 ans, Retraitée Conseillère Principale d’Éducation, Centre. Not...

Le Parti de Gauche de Brest fidèle à sa position anti-austérité pour les élections départementales

De gauche à droite, Guilhem Grimal, Julien Delbende, Anjela Gallais-Lavanant et Antoine Larfaoui , militants du Parti de Gauche de Brest, lors de cette conférence de presse. Le Parti de Gauche (PG) du pays de Brest a tenu une conférence de presse jeudi 29 janvier pour présenter son programme pour les élections départementales des 22 et 29 mars 2015 et réagir à l'actualité récente avec la victoire de Syriza, rassemblement de toutes les mouvances de la gauche n'ayant jamais gouvernés auparavant en Grèce, dimanche 25 janvier. Julien Delbende, jeune militant du Parti de Gauche, revendique pour son parti, et donc pour le Front de Gauche dont le PG est une composante : «  Nous saluons La victoire de Syriza en Grèce. Ce parti a toujours été proche idéologiquement du Parti de Gauche contrairement à toutes les récupérations de tous les partis politiques auxquelles nous pouvons assister depuis dimanche  ». Le jeune militant de la gauche radicale souligne que «...

Les réflexions économiques de Rassemblement pour Brest dans leur nouveau journal

Les élus du Rassemblement Pour Brest avec leurs bulletins de propagande politique dans les mains. De gauche à droite : Brigitte Hûe, Claudine Péron, Bernadette Malgorn, Bruno Sifantus, Véronique Bourbigot. RPB, le groupe d’opposition de la droite brestoise, a tenu une conférence de presse mercredi 26 avril à l’occasion de la sortie de son troisième numéro de Sciage , abordant trois grandes thématiques : l’emploi, la LGV et l’avenir du site de la Défense à Brest. Mais en filigrane de ces trois thèmes, domine celui de l’avenir économique du bassin de Brest et plus largement celui de l’Ouest de la Bretagne. Pourquoi avoir choisi de parler de l’emploi dans ce numéro de Sciage car c’est un domaine d’action qui relève de l’État surtout, plus que de la ville ? «  La sécurité, l’emploi et l’économie sont des préoccupations majeures des gens qui nous interpellent. Pour des tas de raisons il est de notre responsabilité de nous mobiliser pour l’emploi  », explique la leader ...