Les manifestantes parmi les Atsem, présentes dans la partie du public au conseil municipal de Brest jeudi 12 mai 2016. Photo : Marc Gidrol |
Le conseil municipal de Brest s'est
réuni jeudi 12 mai. Les Atsem, (Agents territoriaux spécialisés
des écoles maternelles), comme il fallait s'y attendre compte tenu
du conflit les opposant à la municipalité sur leurs conditions de
travail et leur rémunération depuis le 18 avril, sont venus
perturber ce conseil. Je vous livre ici mon compte rendu de ce
conseil, à la fois tant des différentes délibérations qui ont pu
être validées que de l'interpellation brutale des Atsem.
La
refonte de la place de la Liberté
Le projet de refonte de la place de la
Liberté, dont les derniers travaux remontent à1994, et qui est
programmé dès l'année prochaine, a occupé les débats en début
de séance. C'est ainsi qu' en propos préliminaires, Mme Bernadette
Malgorn, responsable du principal groupe d'opposition municipale, le
Rassemblement Pour Brest (RPB), interpelle le maire, M. François
Cuillandre, à propos de « la refonte de la place de la
Liberté ». Programme confié au Cabinet d'architecture
« l'Atelier de l'Ile » pour un coût de 410 000 €. Elle
attire l'attention sur « des trafiquants de tout poil de
marchandises illicites » sur cette place. Alors « que
nous avions demandé » à plusieurs reprises, « dès
le 30 septembre, et encore le 3 novembre 2015, à être associés à
la réflexion préalable à la définition du cahier des charges dans
lequel devaient s'inscrire les propositions des cabinets d'études »,
elle reproche à M. Cuillandre, son manque de concertation avec
l'opposition municipale.
« Les élus brestois, pour la
plupart, ont découvert vos intentions dans la presse du 5 mai
dernier », s'insurge-t-elle. « …vous bricolez
dans votre coin, en ayant soin de ne pas associer en temps utile les
instances naturelles de débat de notre cité, c'est-à-dire notre
conseil ici réuni ». La convocation du Conseil consultatif
de quartier (CCQ) de Brest-Centre par M. Réza Salami, maire-adjoint
de ce quartier, « pour le 1er juin afin d'y présenter un
projet tout bouclé », ne la satisfait pas. « Comme
notre assemblée, ce ne sera qu’une simple chambre
d'enregistrement, un mauvais moment à passer en somme ! »,
prédit-elle.
Elle lui reproche aussi de ne toujours
pas vouloir recourir à « un système de vidéo-protection
qui permettrait d'assurer la tranquillité des Brestois en dissuadant
les voyous et facilitant l'élucidation des délits par les services
de police ». Dans ces conditions, elle prévient :
« Ne vous étonnez pas si tout à l'heure nous manquons
d’enthousiasme sur la délibération n°28 pour vous donner acte du
bon fonctionnement de la gouvernance de proximité ». Cette
délibération portait sur le bilan 2015 du dispositif de gouvernance
de proximité de l'espace public et des programmes de travaux de
proximité voirie et espaces verts pour l'année 2016.
Thierry Fayret, vice-président de
Brest Métropole en charge de l'urbanisme, de l'habitat et du plan
climat assure que « le projet de la place de la Liberté
n’est pas bouclé. La structure de la place reste encore à définir
en lien avec les commerçants ». « Ceci pour en
finir avec des personnes qui restent là toute la journée aux abords
de la place de la Liberté ».
Rappelons que les travaux consistent à
un réaménagement des abords des espaces commerciaux et à
l'installation de nouveaux mobiliers urbains qui seront réalisés en
2017. Puis l'année suivante ce sera au tour des abords du square
Mathon et du passage Jean Monnet. « On fait confiance à
l'Atelier de l'Ile », affirme le jeune élu socialiste à
l'ascension fulgurante.
Julie Le Goïc, du groupe « Partage
Solidarité », demande ingénument à Thierry Fayret, dont elle
fait partie de la même majorité : « Qu'entendez-vous
par les personnes qui restent là toute la journée aux abords de la
place de la Liberté ? ». Thierry Fayret lui répond :
« Ce sont les personnes qui font des trafics, qui sont
contrôlés par la police nationale de la Ville ».
Les
subventions aux associations
La première délibération portait sur
les subventions accordées aux associations brestoises, dans le cadre
des crédits votés au budget primitif 2016. Ces subventions se
montent en tout à 1 664 570 €.
Rémi Hervé (RPB), rappelle que dans
le conflit opposant la mairie aux associations d'éducation
populaire, la baisse de 4 % des subventions allouées à celles-ci a
été revue à 1,8 % lors du conseil municipal du 22 mars. Mais cette
promesse est assortie « d'une démarche de rationalisation
des méthodes de travail et de mutualisation des moyens »,
rappelle encore le jeune élu prometteur du groupe RPB. « Notre
groupe souhaite aujourd'hui saluer l'esprit de responsabilité et le
volontarisme des responsables associatifs. Ceux-ci ont compris les
contraintes qui s'imposent au budget de la collectivité et sont
prêts à engager leurs structures dans l'effort commun »,
se félicite encore la jeune pousse de la droite brestoise promis à
une belle croissance.
Il pointe du doigt, au contraire,
l'absence d'engagement de la ville et des élus de la majorité
municipale dans la concertation. Le jeune élu au couteau entre les
dents déplore ainsi qu' « aucune proposition n'est
faite par votre majorité ». En conséquence, il exhorte la
majorité "socialo-coco-écolo" de la ville à clarifier ses positions.
« Si votre choix est de ne pas considérer comme une
priorité d'accompagner les associations financièrement dans leur
action. Si votre choix est de ne plus investir dans l'éducation
populaire. Vous devez le dire clairement et l'assumer ».
Mais M. Hervé souligne « l'importance de leur action (NDLR,
les associations d'éducation populaire) dans nos quartiers
pour l'accès aux loisirs, le développement du lien social et la
détection des situations de fragilité ».
Julie Le Goïc, du groupe « Partage
Solidarité », qui a interpellé le maire souvent au cours de
cette séance, s'indigne d'un contrat passé entre Brest Métropole
et les vins Montagne Saint Emilion, comme partenaire des fêtes
maritimes Brest 2016. Le maire lui répond que ce ne sont là que
« rumeurs ». « Les informations sur ce
vin comme partenaire des fêtes maritimes viennent du site Internet
de votre propre fournisseur », lui rétorque la jeune
trublion de la gauche brestoise.
Yann Masson, dont le rayon d'action à
la ville concerne les équipements de quartier, rappelle que ces
subventions sont versées dans le cadre d' « un travail
en commun avec les associations jusqu'en 2020 ». « La
ville a trois priorités avec les associations que sont : le
lien social, la jeunesse et l'enfance », présente le jeune
élu. « On est sur un travail de fond, mené avec tout le
monde », martèle encore celui-ci.
M. Jean-Luc Polard, 4ème adjoint au
maire de Brest, en charge de la cohésion sociale et des habitants,
ajoute qu' « (on) a réglé pour l'année 2016 la
question financière et donc c'est plus facile de traiter le reste ».
Tout en expliquant que la « mutualisation lorsque c'est
possible, ça demande un changement culturel pour les associations,
parce qu'avant chacune d'entre elles travaillait séparément ».
« Maintenant c'est en harmonie avec la ville », se
réjouit le vieux briscard de la gauche brestoise.
Les
Atsem interrompent la séance
Autre vue de la partie du public de la salle du conseil municipal. Deux agents Atsem déploient une banderole où il est inscrit : On a besoin de nos Atsem". Photo : Marc Gidrol |
Les Atsem ont fait une irruption
remarquée dans la salle du conseil municipal. Ce qui a obligé le
maire à déclarer que la séance était interrompue. Alors que les
Atsem sont en grève depuis le 18 avril dernier, leurs revendications
restent encore nombreuses : le remplacement d'un agent absent en
grande section dès la première journée d'absence jusqu'en 2020
comme cela est déjà le cas en petite et moyenne section, la non
modification de leurs horaires hebdomadaires, la constitution d'un
groupe de travail à l'issue du conflit, une discussion à partir des
rythmes scolaires mis en place à l'école de la Pointe et une prime
de 100 €. Ils ont déjà obtenu satisfaction pour la revendication
du dégel du point d'indice de leur salaire. Mesure coûtant cher à
la mairie : 400 000 € selon M. Marc Coatanéa, vice-président
de BM, en charge du personnel de BM et de la ville.
Celui-ci prévient d'emblée et
franchement les Atsem, qu' « il n'est pas envisageable
de revenir sur la prime », pourtant une des revendications
phares des Atsem, mais c'est une demande irréaliste de la part de
ceux-ci. Mme Julie Le Goïc avance pour sa part que leurs
revendications, « ce n'est pas un caprice, c'est une juste
demande ». M. Coatanéa explique que (son) « propos
est plus large que pour les Atsem », « qu'il y a
l'accord au niveau national signé par Mme Marylise Lebranchu »,
lorsque celle-ci était ministre de la Fonction publique et de
l'Aménagement du territoire, « pour environ 300 000 € ».
Il a aussi annoncé pour sortir de cette (longue) crise « une
réunion le 25 mai prochain pour avoir une approche de vue sur les
conditions de travail dans un groupe métier sur le remplacement des
Atsem ». Il a promis aussi « le remplacement des
Atsem dès le premier jour d'absence en grande section de maternelle
dès les 7 janvier, dès lors que le conflit s'arrête ».
Plus surprenant la défense des Atsem
par une membre de RPB, Mme Véronique Bourbigot, conseillère
municipale et métropolitaine et conseillère départementale, qui
remet en cause « une méthode de gouvernance qui consiste à
appliquer des décisions dont on sait d'emblée que les effets seront
néfastes ». Elle déplore un « conflit (qui)
était prévisible et même inéluctable dès l'instant où vous avez
modifié en plein été les règles d'encadrement dans les écoles
maternelles ».
Elle n'y va pas avec le dos de la
cuillère même, la jeune ambitieuse de la droite finistérienne :
« Ce conflit c'est votre équipe qui l'a créé et, par voie
de conséquence, vous portez l'entière responsabilité de la gêne
causée aux familles ». Elle s'attribue le beau rôle
d'avoir « mis en garde contre ces décisions aventureuses et
les effets liés au non-remplacement des Atsem en grande section dès
le premier jour d'absence ». Elle met au pilori également
« la mise en place des rythmes scolaires, dont on voit bien
qu'ils ne sont pas adaptés aux élèves de maternelle ».
« Aujourd'hui pour essayer de sortir de ce conflit, vous
proposez de revenir sur votre décision par un moratoire jusqu'en
2020. Que de temps perdu et d'entêtement pour faire quelques
économies sur des heures de remplacement », râle encore
Mme Bourbigot.
Marc Sawicki, le responsable des
questions liées à l'éducation et aux écoles élémentaires à
Brest a assuré que l' « éducation est notre premier
budget à Brest ». Il a reconnu « des
bouleversements à l'école dès la rentrée 2013 avec les nouveaux
temps scolaires ». Il a aussi garanti qu'« une
évaluation sera mise en place à la rentrée 2016 ».
« Nous débuterons une évaluation tant sur les cahiers des
charges que sur les temps péri-scolaires », informe-t-il.
Mais il a aussi mis en garde les Atsem : « Ce mouvement
commencé il y a plus de 4 semaines génèrent des problèmes et des
inquiétudes des parents, il est plus que temps que ce débat
cesse ».
M. François Cuillandre annonce que
« le remplacement des Atsem lors d'absences se feront avant
2020 ». « Après 2020 nous verrons »,
lâche-t-il. Il répond lui aussi que « pour la prime
sectorielle, notre réponse est connue et elle restera la même ».
« Avec les primes sectorielles, c'est la fin du service
publique territorial », alarme le premier édile. Il confie
aux grévistes : « Vos remarques me défrisent un
peu », faisant allusion à sa chevelure.
Questions
d'enfance
La mairie a approuvé un projet
d'avenant au Projet Éducatif du Territoire Brestois à propos des
rythmes scolaires pour la période 2016-2019. Marc Sawicki informe
que cet avenant sera débattu avec le groupe de travail sur la
question des Atsem. Christine Margogne, du groupe Brest Alternative
(BA) avertit que son groupe s'abstient sur cette délibération, du
fait que « ces nouveaux rythmes ne sont pas le fait de cette
municipalité mais d'une décision gouvernementale qui génère de la
fatigue, des difficultés de gestion de travail pour les enseignants
et le personnel éducatif ». « Il en résulte une
facture salée et bien des mécontents », vitupère l'élue
centriste.
À propos de la restauration scolaire
qui a fait l'objet d'une délibération aussi lors de ce conseil, il
a été décidé de poursuivre l'effort sur les filières biologiques
et locales. Ainsi, M. Charles Kermarrec, conseiller municipal du
groupe Brest Nouvelle Citoyenneté – L'Autre Gauche (BNC), informe
que « les repas servis dans les cantines ont vu leurs parts
augmenter de 30 % pour les aliments bio et de 30 % en produits
locaux ». « Un travail peut être approfondie sur
le gaspillage alimentaire, par exemple, par le compostage des
bio-déchets », ajoute l'élu d'extrême gauche.
M. Marc Sawicki complète pour sa part
que « l'évolution de cette restauration scolaire est
admirable ». « Avec notre partenaire, la Maison de
l'Agriculture biologique, on fait un travail remarquable avec eux »,
précise l'élu socialiste.
Questions
de finance
Une convention d'apport en compte
courant entre la ville et la SPL (Société Publique Locale) « Les
ateliers des Capucins » a aussi été signé lors de ce
conseil municipal pour un montant de 15 000 € sur deux ans
renouvelable deux fois. Bernadette Malgorn prévient que son « groupe
est défavorable à cette convention ». Et donc son groupe
RPB ne l'a pas votée. La municipalité a aussi voté la
constitution d'un groupement de commandes entre la ville et Brest
Métropole pour l'achat de prestations de services de déménagement.
Là encore, Mme Malgorn intervient, mais cette fois-ci pour annoncer
que « nous sommes sur le principe plutôt favorables aux
groupements de commandes », tout en s'abstenant sur cette
délibération.
Questions
de culture
Dans le domaine culturel, la mairie a
approuvé la radiation d'un dessin de Nicolas Ozanne de l'inventaire
de la ville et se trouvant au musée des Beaux arts. Gaëlle Abily,
en charge de la culture à la ville et à BM, justifie qu « 'il
faut restituer l’œuvre à l'État ».
Mme Claudine Péron (RPB) a souhaité
intervenir à propos de cette délibération, pour demander des
explications à propos de « l'utilisation des locaux de
l'ancienne bibliothèque d'études ». Elle s'émeut aussi
de « la dépose des dernières dalles en pierre situées-sur
un trottoir de la rue Danton ». « Ces dalles
anciennes pourvues de crochets à chevaux ont été enlevées,
semble-t-il, sans précaution à l'occasion des travaux de rénovation
de la chaussée », s’inquiète l'élue de la vieille
garde de la droite brestoise, ancienne commerçante de la ville. « Il
serait prévu de les remplacer par un enrobé, ce qui est dommageable
d'autant plus que ces dalles avaient fait l'objet d'une concertation
des membres du CCQ qui en avaient soulignés le caractère original
et remarquable », plaide Mme Péron.
Monsieur Réza Salami, maire-adjoint du
centre-ville, nuance le « caractère historique relatif »
de ces dalles « posées en 1959 ». « Mais
ces dalles étant munies de crochets à chevaux sont sûrement plus
anciennes que 1959 », défend l'élue RPB. « Nous
avons procédé par renouvellement des réseaux et nous avons
renouvelés les enrobés. Ces dalles sont dans des entrepôts et
elles seront redéposées de la manière la plus optimale possible »,
se veut rassurant M. Salami.
Mme Gaëlle Abily a aussi divulgué les
noms de sept nouveaux lieux dont une placette Jeannette Bouillol à
Recouvrance. Cette dernière n'est pas une inconnue à Brest et
surtout sur la rive droite de la ville, où comme chanteuse elle a
incarné pendant 75 ans au moins la culture populaire par ses
chansons paillardes avec le parler de Recouvrance qui était
totalement inconnue de la rive gauche de la ville même. Brest même
étant divisé par la Penfeld en ces deux secteurs. Mme Jeannette
Bouillol est la maman de Jacky Bouillol, un des chanteurs du groupe
Les Goristes, lui aussi très connu à Brest et en Bretagne.
Mme Marif Loussouarn, élue écologiste
(EELV) est « très contente de voir que Jeannette Bouillol
va avoir sa place à Brest ». « C'est une petite
avancée vers l’égalité femmes-hommes », se
réjouit-elle. Elle revient sur l'affaire Denis Baupin, adjoint EELV
à la maire de Paris et mari d'Emmanuelle Cosse, ancienne secrétaire
général d'EELV et actuelle ministre du Logement. « Pour
nous avoir dans nos rangs un homme inculpé d'affaire de machisme
est intolérable. Le féminisme est un fondamental pour nous »,
exprime comme sentiments Mme Loussouarn par rapport à cette affaire
de harcèlement sexuel. « Une femme sur dix a été violée
ou le sera au cours de sa vie », expose comme chiffres
l'élue écologiste. « Seulement 11 % de ces femmes violées
osent prendre la parole ». « Le groupe EELV se
fait un point d'honneur à ne pas laisser dans l'omerta ce genre de
faits », conclut Mme Loussouarn , très engagée sur
la question de la féminité.
C'était un conseil municipal qui a pu
être tendu à certains moments, notamment sur la question des Atsem,
dont la revendication d'une prime mensuelle de 100 € cristallise
toujours les tensions avec la municipalité, mais dans l'ensemble qui
était bon enfant. La majorité municipale ne rencontrant que peu
d'obstacles à ses décisions dès lors qu'il ne s'agit pas du
budget, des infrastructures pharaoniques de celle-ci et des nouveaux
rythmes scolaires, réforme combattue depuis de nombreuses années
par l'opposition brestoise, y compris dans l'ancienne mandature.
Beaucoup de délibérations là faisaient consensus.
Marc Gidrol
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